Un jour j’irai à New-York avec toi vivre mon Manhattan Transfer. Arpenter les rues, le menton fier, le nez pointé vers la cime des buildings, les yeux plissés pour échapper au brûlures du soleil qui s’y reflèterait trop et les mains dans les poches. Sac au dos, crayon et carnet bien au chaud, on jouerait nos John Dos Passos. On râlerait à chaque bloc quand le signal « wait » se  ferait catharsis de notre émerveillement, on oublierait le temps dans les cafés, on se noierait dans le Martini face à l’Hudson. On vivrait à saturer nos poumons d’un air de fête, on consignerait jalousement nos souvenirs dans des Moleskine et de l’argentique. Du noir et blanc, de la fumée, du flou, de l’italique, comme ces immeubles que la hauteur et la vitesse nous font voir pencher. Tu serais mon Elaine, assise face à moi, envoûtée par le son du piano et l’odeur tu tabac chaud. Je te parlerais de mon Amérique, de son Jazz, de mon 42ème parallèle, des hot-dogs à la volée, du charme de la ville à Noël. Tu tirerais le rideau sur notre relation et les Fenêtres sur Manhattan mais je garderais un bon souvenir du temps où l’on filait au MoMa la journée et un mauvais coton le soir. On aurait pu rire ensemble sur les trottoirs de Broadway, partager des glaces à Tribeca et tous ces autres moments que tu ne me laisserais pas vivre auprès de toi. New-York est faite pour moi, sans doute pas pour nous. Un jour j’irai à New-York avec toi et tu m’y laisseras. En savoir plus – la bibliographie : Manhattan transfer de John Dos Passos 42e parallèle de John Dos Passos Fenêtres sur Manhattan de Antonio Muñoz Molina