Quand on est petit, on est téméraire, on brave sa peur.
Moi, je garde ce souvenir de « musée de la torture », je ne sais où…
J’étais fasciné par l’ingéniosité qu’était capable de déployer l’être humain pour faire souffrir les gens. Il y avait ces pinces pour arracher les langues, ces roues qui étirent les membres, ces crocs de boucher, des chaises à clous et cette espèce de rouet auquel on attachait les intestins d’un homme éviscéré mais encore bien vivant avant de le faire tourner et d’extraire le tout.
Je crois que cette douleur qui renverse les entrailles, c’est un peu ce que je ressens. C’est profond, c’est permanent et ça résonne dans tout mon corps. Ma tête tourne et devient intensément lourde. Elle me nargue, me fait croire que je pourrais m’abandonner, perdre connaissance, m’égarer aux frontières de la folie mais non, elle me ramène sans cesse à la réalité. Mes pieds sont glacés, ancrés dans le sol, enracinés face aux faits que je voulais nier, que je m’efforçais de fuir : la cruauté est si facile et si naturelle… Le réaliser, c’est bouleversant…
Et c’est ainsi qu’on a pu voir le doux troupeau de moutons devenir horde de hyènes. On les a vus sortir du bosquet pour aller chasser les oisillons tombés trop tôt du nid. Ils fondent en masse comme le plus grands rassemblements de charognards qui soient.
Alléchés par l’odeur du sang et du massacre, ils font leur entrée dans le Cirque, se délectant de leur violence. Les proies ne sont pas toutes innocentes, elles sont parfois habiles et, à l’occasion, parviennent à s’échapper du piège qui leur est tendu mais les agresseurs ne se rassasient jamais. Insatiables, ils continuent de rôder jusqu’à ce qu’un jeune aventurier présume une fois de ses forces et se jette en pâture.
Et le voir, ça fait mal.